A10 : le dangereux métier des hommes  » en jaune « 

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Il y a eu autant de fourgons autoroutiers percutés en six mois cette année que durant tout 2016. Nous avons accompagné un patrouilleur pour comprendre.

En quinze ans de patrouille, Thierry Bessac affirme qu'il pourrait écrire un livre.

En quinze ans de patrouille, Thierry Bessac affirme qu’il pourrait écrire un livre.

 Jaune, tout est jaune fluo chez un patrouilleur. Le chasuble devenu tee-shirt, comme le fourgon siglé ASF Vinci. L’homme comme la machine ne passent pas inaperçus. Ce n’est pas un hasard : ils sont justement faits pour être vus. Mais rien n’y fait. Malgré des balisages préventifs de plus d’un km, des flèches lumineuses puissantes et des gyrophares à tous les étages, les fourgons des 1.353 « hommes (et femmes) en jaunes » se font percuter.

 » Les gens ne font pas attention à nous. Ils roulent comme des balles « 

Près de 50 utilitaires bousillés depuis le début de l’année. Et des grosses frayeurs pour les agents, sur les 4.422 km du réseau Vinci autoroutes (ASF, Escota, Cofiroute), dont l’A10, fait partie. C’est presque autant que pour l’ensemble de l’année 2016 (lire repères).
En ce week-end très chargé du 14 juillet où les prévisions de circulation prévoient jusqu’à 1.800 véhicules sur l’A10 samedi, à 2 h du matin (un record), nous sommes montés avec l’un des patrouilleurs.
Thierry Bessac, 49 ans, travaille depuis quinze ans au centre Vinci de Rouillé (12 salariés). Pour cet ancien pompier volontaire, qui a accepté la vie comme une prise de risques, le quotidien, c’est le fourgon Master de 150 chevaux et des kilomètres avalés entre les sorties Poitiers sud et la Crèche.
Le cahier des charges dressé par l’État leur impose de sortir une fois par jour au minimum. En réalité, les « hommes en jaune » se croisent en permanence sur le réseau. Ce sont les indispensables « yeux de l’autoroute », ceux qui protègent les naufragés de la route et évitent le suraccident. Mais ils ne sont pas récompensés.
« Les gens ne font pas attention à nous. Ils roulent comme des balles au milieu d’un balisage. La gendarmerie a parfois relevé jusqu’à 140 km/h au lieu de 90 km/h dans une zone de travaux ! Les mêmes automobilistes sont soulagés de nous voir arriver en protection quand ils sont en panne sur la bande d’arrêt d’urgence C’est la qu’ils prennent conscience du danger d’être un piéton sur l’autoroute. » Paradoxal métier où l’on est vu tour à tour comme un « gêneur » ou un « Saint-Bernard. » La durée de vie d’un piéton sur une autoroute est estimée à 15 minutes. Pour les patrouilleurs, c’est un quotidien. « Des fois, ça se joue à peu de chose. Une voiture m’a frôlé à 50 cm, dernièrement. C’était juste mais c’est passé… » Et les camions la grande hantise. « On voit vraiment de tout : la consultation des portables, c’est le pire. » Mais il y a aussi la télé dans la cabine des camionneurs.
Tiens, un VRP vient de doubler le fourgon, un ordinateur portable sur les genoux ! « Le comportement des usagers a changé. Ils disent qu’ils ont payé « et qu’ils font ce qu’ils veulent ». Il y a moins d’accidents mais ils sont plus violents. Il faut que la mentalité des automobilistes évolue. Quand on voit le nombre de panneaux mis en place sur une zone de travaux, je ne vois pas ce qu’on peut faire de plus pour les faire ralentir. Un radar de chantier, peut-être ? »
Aucune intervention à signaler lors de la sortie. Cette fois-ci, le salaire (un SMIC à l’embauche) du patrouilleur n’aura pas été celui de la peur.

 

Déjà 49 véhicules percutés en 2017 sur le réseau Vinci (52 en 2016)

> En 2016, 124 fourgons autoroutiers ont été percutés sur l’ensemble du réseau autoroutier français, dont 52 sur le réseau Vinci.
> Depuis le début de l’année 2017, déjà 49 fourgons Vinci percutés.
> Ces accidents se produisent souvent en journée, sur des sections offrant une bonne visibilité, alors que la signalisation des véhicules (gyrophares) est activé.
> Zones de travaux : 53 % des Européens (55 % des Français) oublient de ralentir à l’approche de l’une d’elle.
> Distances de sécurité : 63 % des Européens (76 % des Français) ne les respectent pas.

 

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